Frammento n. 40 di “The truth of Labyrinth”
A ce stade, on se contentera de les nommer.
Un, la Colère (Méphisto)
L’un de ses principaux paramètres tiendra de la «frontière» (subjective ou physique). L’idée sera celle d’une limite à ne pas franchir. La sensation évoquera une effraction, une violence intime proche d’un viol. Une souffrance qui criera vengeance. De fait, pareille «frontière» définira toujours une identité (singulière ou nationale). A y toucher, à la franchir, la réaction sera immédiate: la fureur. Un souffle brûlant. Une sourde explosion. Puis, le passage à l’acte. L’absence de contrôle. La perte de soi. Une aliénation foncière du Sujet, qui vomira l’intrus, le vouera aux gémonies, avant de chercher à l’abattre. Car, il en va de l’enveloppe identitaire, comme d’un corps: on ne saurait s’y attaquer sans encourir de risques. Souvent, le danger sera même maximal «tout cela pour un rien, une bêtise, songera le sage, médusé, l’œil rivé aux feux qui se propagent».
Deux, la Vanité (le Matamore)
Pareille passion s’étalera, se diversifiera, se prolongera en une parade, un «donné à voir». Déchaînée dans nos sociétés où le show est vénéré, on imagine mal les dégâts qu’elle provoque. Carrières, performances, orgueils divers sont ses atouts. Le Matamore s’avancera sur les tréteaux et entamera une danse pathétique. Ne suis-je pas le plus beau, ou le plus riche ou le plus talentueux ou le plus puissant, sinon les quatre en même temps? Il fait la roue, le Matamore, il se la joue. Son art est l’illusion des grandeurs, une folie sensée nous aider. Une façon « d’acting out » apte à pousser le Sujet dans ses derniers retranchements. Car il court le Matamore en clamant sa vanité à tout va. Viendrait-on à le rabaisser, qu’à nouveau sera franchie une «frontière». Là, où se niche une bête blessée prête à mordre ou tuer tant est grande sa fureur.
Trois, la Peur (l’Esclave)
Pareil sentiment est irradiant et peut s’appliquer sur une multitude d’objets: de l’araignée à la mort, en passant par bien des métamorphoses (phobies, crainte de l’abandon, etc.). Son ultime déterminant sera la peur de l’Autre, avec cet effet une paralysie du corps et de l’esprit. Car la peur tétanise le Sujet. L’Esclave à genoux, implorant on ne sait quel dieu, régressera, se rétractera, en se vidant de ses forces. Une régression qui nous ancre dans d’obscurs automatismes. L’Esclave sera comme le jumeau inversé du Matamore.
Quatre, l’Ignorance (l’Ombre)
Il s’agit d’une pulsion active, originaire. L’Ombre plonge dans nos inconscients et nos errances. Car, elle s’est déjà faufilée dans nos existences. Omniprésente, elle est le démon-souche celui dont découlent les trois autres. On ne saurait éradiquer une Ombre, à moins de sombrer dans un fol espoir: un savoir absolu (ou souverain bien) révélé, dogmatique, aux «frontières» faussement gravées dans de l’airain. L’Ombre a la consistance de la fumée, là voilà d’ailleurs qui nous enveloppe et nous étouffe. A rebours des vérités qu’il nous incombe de protéger.
«Tellement insignifiantes», dirait le Sage, trop conscient de nos limites.